L'établissement pour jeunes filles... tenue de rigueur exigée: jupe obligatoire, blouse beige ou bleue en alternance chaque quinzaine portant à la poitrine nos patronymes et notre classe brodés de rouge, (l'ancêtre du badge en somme) a laissé quelques traces sur ma vieille carcasse.
Dans ce lycée bien coté de la Capitale (le pendant féminin du fameux H IV- ne pas lire H.I.V. mais Henri IV)
s'ouvrait aux garçons pour la première fois de son histoire..(détail uniquement nécessaire à la véracité historique)
Mesdemoiselles, Jeunes hommes,
Asseyez vous! en silence ....
L'entrée en classe de Français, sous entendait pour un petit piaf de dix ans,la torture sous la dictée,les crampes aux poignets pour tenter de suivre le rythme de ces mots à inscrire...
Chaque nouvelle phrase, était un arrêt cardiaque en puissance,une angoisse qui m' étreignait dans ses serres de Condor...
Les doigts moites essuyés en vitesse sur la blouse pour ne pas tâcher des lignes kéyes,devenues troubles à travers des larmes naissantes, se crispaient sur le stylo bille.
Ces mots inconnus, aux fautes inéluctables qui feraient mon tourment la semaine prochaine, je les haïssais.
Je connaissais le pronostic de ma copie corrigée: débitrice de nombreux points à valoir sur la prochaine, qui serait débitrice à son tour... le crédit révolving était né sur mon cahier.
Parfois la grammaire, les questions subsidiaires me laissaient quelque répit jusqu'au découvert à venir. Je concourais plus facilement dans la catégorie rédaction, mais la faute d'orthographe veillait, perfide, à faire dévaluer ma devise.
Quand la cloche enfin sonnait un air de liberté, je passais devant les portes épaisses de la bibliothèque, jetant un oeil intrigué, n'osant franchir ce sanctuaire de savoir...la fautive fauteuse, aller à la bibliothèque mais pour qui se prend-elle ?? On étudie ici ! On fait de la recherche !!
Ce n'est pas un guichet de la Banque de France réservé aux sur endettés, qui effacerait d'un coup votre ardoise !
J'ai osé un jour, avec l'aide de "deux rats de bibliothèque", pousser la porte capitonnée : j'ai vu ces étagères, ces livres reliés, ces encyclopédies enluminées, ces magazines..ces élèves chuchotant pour ne pas déranger la Grand messe du savoir!
J'avais lu quelques livres bien sûr auparavant, mais rien qui ne soit dévorable, rien qu'on ne m'ait vendu aussi bien que ce premier gros volume recommandé par mes amies liseuses: "Mon Amie Flicka".
Quelques jours plus tard, nous venions "m'inscrire" en qualité de membre éminemment reconnu par ses pairs, sur la liste d'attente du rêve Américain. "Flicka" était rentrée au box et n'avait pas de prétendant pour la promenade, j'eus donc la remise du prix convoité après avoir signé la fiche d'emprunt....
Ce fut la cavalcade dans l'herbe verte du Wyoming, les roulades avec les Yearlings (jeunes chevaux), l'angoisse de l'abattoir après blessure, puis ce fut le tome deux, le trois, ensuite je changeais de monture, de pays, d'auteur... je dévorais la bibliothèque sautant les obstacles dans une frénésie sauvage.
Deux ans passèrent... je retrouvais la vieille demoiselle professeur de Français: ma dictée de rentrée ne comportait plus une seule faute, on m'interrogea: vous n'avez pas une soeur ? : j'ai souvenir d'une élève qui s'appelait comme vous...mais qui avait de réelles difficultés en orthographe !
Chaque jour je croque des mots avec un plaisir grandissant, ma vieille carcasse s'interroge à son tour ...
Comment se peut-il qu' un cheval , soit parvenu à faire pousser une plume sur mon duvet de piaf ?
"Flicka" devait être........... ailée !
@Tricôtinolycée
Résumé : (Wikipédia)Kenneth McLaughlin, dix ans, vit avec sa famille dans un ranch du Wyoming. Après de longs mois de pensionnat, il rentre chez lui pour l'été et retrouve les paysages qu'il adore et surtout les chevaux que la famille élève. Son rêve est de posséder un cheval rien qu'à lui, mais il est trop rêveur et irresponsable. Son père refuse puis finit par céder.
Lors d'une balade, Ken croise une bande de chevaux sauvages, qui galopent dans les plaines, ivres de liberté. Ken tombe amoureux d'une de ces petites pouliches, c'est elle qu'il choisit. Mais privée de ses congénères et de sa liberté, la petite pouliche, baptisée Flicka (petite fille en Suédois), se désespère et, tentant de s'enfuir en sautant de hautes clôtures de barbelés, va gravement se blesser. Cet été-là, Ken va tout sacrifier pour gagner à tout prix l'amitié de Flicka.