Défi n°52
proposé par Hauteclaire
communauté CROQUEURS DE MOTS
Ce n'est pas à des marins aussi aguerris, habitués à naviguer sous toutes les latitudes, que je vais apprendre que nous vivons sur une terre de légendes et de mystères. Et Dieu sait qu'ils sont nombreux, et de toutes les époques.
Alors dites-moi : quelle est la vôtre ?
Je suis sûre qu'il y en a une que vous avez vécue. Vous en savez tous les coins d'ombre, quelle en est la vérité.
Pour nous, et seulement pour nous, à bord de la coquille, racontez-nous !
Que se soit la construction des pyramides, celle de Stonehenge, le triangle des Bermudes, L'Atlantide, la Marie-Céleste et les prophéties de 2012 , ou encore les dinosaures, levez un coin du voile ..
A vos parchemins, sous la bougie d'une nuit noire ...

Les gens de Saint Rosary, me contèrent cette histoire ....Sur le marché aux fleurs, il y avait de quoi enchanter chaque amateur, profusions de bouquets, de boutures, de graines étaient présentées sur les éventaires. Une foule s'accumulait l'été à la foire annuelle, devant la petite installation de Sir John homme affable, joyeux, aux sourires larges, autant de récompenses reçues par les clients avant le moindre achat. Sir John était la bonté incarnée: on la sentait transpirer sous chaque pore de son corps, les roses qu'il produisait étaient d'une beauté incomparable, et les fioles de parfums distillés par ses soins trouvaient preneurs , chacun savait repartir avec le meilleur des roseraies "Sir John".
Passionné qu'il était, travailleur, paternaliste et protecteur avec ses jardiniers, il avait ce doigté inné pour choisir les roses, mettait tout son coeur dans la confection du parfum, remuait les éprouvettes ,veillait d'un oeil heureux sur la petite vie de la roseraie. De ses alambics sortaient des sucs enchanteurs, devenus légendaires jusqu'aux villages les plus éloignés .... A peine déposiez vous une goutte de l'essence fabuleuse, l'ambiance était radieuse, la joie, les rires, la bonne humeur fusaient, on s'arrachait, toutefois avec courtoisie, les fioles "Sir John", si l'on n'avait pas eu la chance d'en obtenir , on prenait son mal en patience et l'on revenait à la saison suivante avec l'espoir d'en obtenir, Sir John ne anquerait pas d'en faire profiter chacun à son tour.
A l'époque, les langues villageoises allaient bon train, on présentait Sir John aux touristes comme le "roi de la Rose", le "roi du parfum délicat" mais sa femme Hilary ..."on peut pas la sentir" Lady Hilary n'accordait paraît il ses grâces si tant est qu'elle en eût, qu'aux bien nantis, aux pourvoyeurs de monnaie, aux puissants, ses sourires ne dupaient personne sur le marché: "Hilary est hilare si vous avez de l'or ! surtout de l'or en barre, une sacrée épine dans le talon de John."
Sir John mourut un soir de décembre, le domaine revint à sa femme, il fallut continuer à faire vivre les roseraies, les petits jardiniers s'affairèrent à tailler les rosiers dès le printemps en mémoire de leur bienfaiteur. Hilary héritière, mit son nez et sa mauvaise humeur dans les jardins, invectivant sans cesse ses troupes , des mots assénés comme des injures: rentabilité, pourcentages, ratios.. Il fallait produire plus, puisque le marché était porteur! Fit planter de nouvelles variétés ,remua les éprouvettes, y insufla toute sa rage, produisit des quantités effarantes de flacons mais sur le marché d'été , les badauds se cherchaient querelle, des pugilats éclataient pour un rien, les clients en venaient aux mains et les fioles restaient invendues
Hilary fut ruinée, la roseraie mise aux enchères, sans trouver acquéreur . Les jardiniers ne voulant pas laisser leur raison de vivre à l'abandon, s'organisèrent et remontèrent l'affaire.... ils eurent ce doigté inné pour choisir les roses, mirent tout leur coeur dans la confection du parfum, remuèrent les éprouvettes , veillèrent d'un oeil heureux sur la petite vie de la roseraie. De leurs alambics sortirent des sucs enchanteurs.... Aujourd'hui encore, à peine déposez vous une goutte de l'essence fabuleuse, l'ambiance est radieuse, la roseraie rebaptisée " Saint John Rosary" en mémoire de son créateur, est florissante , il y court un parfum de bonheur ...
Au village , on se plait à penser que les roses perdirent leur fragrance au contact de l'argent sans odeur, seul le langage de l'amour les firent s'épanouir.
@Tricotinôlégende